Extrait de l'intervention d'Annik SCHNITZLER
aux Journées
Techniques Nationales "Renouées"
Actes JTNR (ECHEL 2003),
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LES RENOUEES GEANTES EN EUROPE
Annik SCHNITZLER*
I. INTRODUCTION
Les renouées géantes (Fallopia japonica et F. sachalinensis)
font parler d'elles depuis quelques décennies seulement,
en raison de leur spectaculaire avancée dans les paysages
européens, notamment dans les plaines alluviales. Ces
plantes ont pour origine l'Asie (Chine, Japon, Corée,
Taiwan), où elles prospèrent à une gamme
d'altitudes très étendues, des plaines aux hautes
montagnes volcaniques jusqu'au-delà de la limite forestière
(2200 m) Leur introduction en Europe et en Amérique du
Nord date du milieu du 19ième siècle Fallopia japonica
a été ramenée du Japon (probablement l'île
de Honshu) par plantations à partir des cultures clonées
effectuées par Philippe von Siebold, entre 1825 et 1840
(Conolly, 1977). En 1847, cette plante obtenait la médaille
d'or de la Société d'Agriculture et d'Horticulture
d'Utrecht, en reconnaissance à sa valeur ornementale,
ses propriétés mellifères et sa faculté
à supporter les sols instables et toxiques (Bailey et
Conolly, 2000). Quant à Fallopia sachalinensis, son introduction
est de 50 ans plus récente : on la retrouve en 1864 dans
le jardin botanique de St Petersbourg, où elle fut plantée
vers 1855.
Depuis ces dates lointaines, les populations introduites en Europe
se sont lentement développées à partir des
plantations, mais aussi dans les décharges, et par propagation
naturelle le long des rivières. Leur vitesse d'expansion
a augmenté exponentiellement après 1930. En Europe,
leur aire d'expansion est actuellement considérable :
2000 km du nord au sud et de l'est à l'ouest, de la côte
atlantique à la Mer Noire, et du nord du Portugal et l'Espagne
(42° N) aux côtes de Norvège et de Finlande,
jusqu'à la latitude de 63° N (Conolly, 1977 ; Beerling
et Woodwarth, 1994).
De plus en plus abondantes, de plus en plus agressives pour la
flore autochtone, et de plus en plus difficiles à contenir,
elles font maintenant l'objet de multiples travaux de recherche
dans les domaines appliqué et fondamental, dans le but
de tenter de limiter leur développement, voire, pour les
plus optimistes, de les éradiquer. Les raisons d'un tel
succès sous d'autres climats sont multiples et vont être
rapidement examinées dans cet article.
II. MORPHOLOGIE
Fallopia japonica et F. sachalinensis font partie de la famille
des Polygonacées, qui comprend 40 genres et 800 espèces
dans le monde. Le genre Fallopia (Houtt). Ronse Decraene, remplace
les dénominations précédentes de Polygonatum,
et Reynoutria. Il comprend trois types biologiques : des taxons
érigés, rhizomateux et perennes, des taxons lianescents
perennes et des taxons lianescents annuels. Les espèces
introduites en Europe sont du premier type.
L'espèce japonica comprend deux écotypes, l'un
(variété japonica) géant, montant jusqu'à
1400 m d'altitude sur les montagnes japonaises, et l'autre (variété
compacta) naine, se développant entre 1400 m et 2200m.
Ces deux écotypes ont été introduits en
Europe, mais seule la variété japonica est devenue
invasive.
Le nombre chromosomique de base de Fallopia est x=11. Il existe
des diploides 2n = 44 (surtout au Japon), à la différence
des plants chinois ou coréens, qui sont octoploides (2n=88).
F. sachalinensis est plus largement tétraploide dans son
pays d'origine.
(...)
* Equipe de Phytoécologie, Université de Metz
(EBSE), Campus Bridoux, Avenue du Général Delestraint,
57070 Metz. Mél : schnitz@univ-metz